Réveillé par les premières gouttes de pluie, Robinson commença à redescendre péniblement vers le rivage d’où il était parti la veille. Il sautait de rocher glissants en rochers glissant et de tronc moisi par l'humidité en tronc moisi, de talus verdâtre en talus verdâtre et de souche humide en souche humide, et il éprouvait un certain découragement parce qu'il se sentait seul et affaibli après avoir passé une mauvaise nuit de sommeil à essayer de réanimer son modeste feu. En somme sa situation était bien triste et désespérée. Certes, cette ile était plutôt vaste mais Robinson ne s'y sentait pas bien, il était mal à l'aise. En outre elle paraissait terne avec sa sombre plage au Nord, des prairies arides à l'Est, sa forêt pelée à l'Ouest, et, en son centre, ces rochers où se trouvait une petite grotte lugubre et austère qui offrait un point de vu panoramique sur cet horizon désolé. Il en était là de ses réflexions quand il aperçut au Nord de la piste qu'il avait suivie pour chasser la veille, le cadavre répugnant d'une chèvre visiblement tuée par un autre animal bien plus grand. Déjà une demi-douzaine de vautours au cou déplumé et au bec crochu se disputait la charogne suffocante. Robinson les dispersa en faisant tournoyer son bâton au-dessus de sa tête et les oiseaux bien repus s'envolèrent lourdement l'un après l'autre en courant sur leurs pattes torses pour décoller.